Recentrons le débat. Je me suis tapé deux moments de bonheur (littéraires, s'entend).
Un pays à l'aube, de Dennis Lehane (déjà parlé de Shutter Island, excellent, et de Un dernier verre avant la guerre, bon après un démarrage poussif) ; roman noir US, début XXème, racisme et luttes sociales.
Voilà un Lehane qui n'est pas un polar. C'est une fresque en teintes de gris sur l'histoire US au crépuscule de la WW1. Les héros blancs rentrent au pays après la sale guerre et entendent récupérer leur travail laissé aux noirs pendant leur mobilisation. Ce qui ne va pas se faire sans tensions dans cette période d'appartheid généralisé. Mais nous sommes aussi aux lendemains de la révolution russes, ce qui a un impacts très fort sur les masses laborieuses américaines.
A travers 3 histoires concomittantes, Lehane brosse un tableau bien sombre de ce moment crucial où l'amérique aurait pu devenir autres chose que le temple de l'ultra-libéralisme et du conservatisme chrétien. Des prises de position, mais sans trop de manichéisme, du style et une vraie bonne histoire : une totale réussite.
(bon ok, le machin est un peu épais, mais ça coule tout seul et c'est très prenant)
Les sept fils de Simenon, de Ramon Diaz Eterovic (première dose) ; polar chilien humain, décalé et dépressif.
Les écrivains de romans noirs hispanophones que j'ai pu lire ont tous ce petit grain de folie qui font de leurs romans des expériences jubilatoires. Ramon ne fait pas exception et son privé alcoolique et au fond du trou, qui discute de philosophie avec son chat Simenon, est comme les privés ou flics de Taïbo ou de Ledesma, humaniste sans le vouloir, anarchique-chiste et grandement philantrope. Je suis totalement dépendant de ce type de littérature et, notamment, des aventures d'Heredia, ce romantique raté et désabusé. Une deuxième dose s'impose.