graham a écrit:
Delphine Batho peut remercier Sarkozy : les déboires de notre ancien président occultent un peu à quel point elle s'est rendue ridicule. Après avoir parait il fait pendant un an la démonstration quel n'était pas au niveau pour être ministre, elle a réussi à se griller en une seule conférence de presse alors qu'en faisant profil bas elle aurait eu le droit à la sympathie de l'opinion publique. Quel gouvernement après ça prendrait le risque de lui donner à nouveau sa chance ? Déjà que l'ingrate s'était permise de taper sur Ségolène à qui elle devait tant...
C'est si difficile d'envisager que tous les hommes et femmes politiques ne sont forcément pas mus par une ambition carriériste, qu'ils ont parfois des convictions qu'ils refusent de brader pour un strapontin ministériel ou une cote de sympathie auprès de l'opinion publique ? (au passage, balancer sur le gouvernement, vue l'image médiocre de celui-ci, je ne vois pas où sa cote de popularité risque grand-chose...)
Je ne sais pas si c'est le cas de Delphine Batho, je ne connais pas bien le personnage, certes, mais c'est pénible d'entendre toujours la même musique "homme/femme politique = homme/femme rationnelle", et les deux interprétations des éditorialistes qui en découlent : 1) Delphine Batho est complètement nulle en politique, 2) Delphine Batho, poussée par les communicants, écrit une "story" devant les Français et prépare son avenir politique. M'enfin, l'homme ou la femme rationnelle, qui calcule tout, qui prémédite tout, qui anticipe tout, ça n'existe que chez Adam Smith ! Toi, au quotidien, tu te comportes toujours de façon rationnelle ? Non. En ton for intérieur tu essaies peut-être de donner une cohérence à tes actes, mais cette cohérence (cette rationalité) peut apparaître complètement absurde aux regards extérieurs s'ils sont animés par des logiques, des principes différents des tiens. Et c'est pareil pour les hommes et femmes politiques.
Peut-être que Delphine Batho a des convictions (encore une fois je l'ignore) et que, devant l'impasse du contexte gouvernemental actuel, elle en a eu marre d'avaler des couleuvres, elle a voulu dire sa vérité aux Français et puis voilà le résultat. Tout simplement. Sans arrière pensée, sans plan sur la comète. Et ce n'est pas son attitude vis-à-vis de la fonction ministérielle qui en fait une bonne ou une mauvaise femme politique. Jean Jaurès n'a jamais été ministre, à une époque où les gouvernements duraient maximum 2 ans et où des socialistes y trouvaient un portefeuille, mais peu de gens lui dénieraient le qualificatif de "grand" homme politique. Heureusement qu'on peut faire de la politique (tant au sens noble qu'au sens moins noble du terme) sans être ministre ! Hollande peut en témoigner.
C'est aussi pénible d'entendre ce jugement sans appel : "Elle ne sera plus jamais ministre d'un gouvernement PS !". Ca dépend des circonstances politiques du moment. Arnaud Montebourg, en privé et en public, a autant balancé (voire plus) sur le gouvernement que Delphine Batho, et pourtant il est toujours ministre. Parce que Hollande estime, à tort ou à raison, que c'est la "caution de gauche" de sa présidence. Si dans les années futures Delphine Batho acquiert la même valeur politique que Arnaud Montebourg en 2011, il y a fort à parier qu'elle reviendra au gouvernement et peut-être dans un gouvernement plus favorable à ses convictions (si elle en a) et à leur réalisation pratique.
En fait, je m'en contrefous pas mal de Delphine Batho. C'est juste que les analyses des choix individuels d'un homme ou d'une femme politique, basées sur l'utopie d'une rationalité absolue, ça me gave. Jusqu'ici, nous avons voté et nous votons pour des êtres humains, pas pour des robots.