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Petit décodage du discours de Sarko sur la suite d'HADOPI : - Cliquez ici pour faire apparaître le contenu caché
Le Monde.fr a écrit: Dans son discours à Avignon, où il s'est dit en faveur d'une extension des lois contre le téléchargement illégal aux sites de streaming, le président de la République a avancé plusieurs arguments sujets à caution.
"Grâce à la loi Hadopi, le piratage par P2P, individuel, a reculé de 35 %. Il y a 35 % de piratage en moins ! C'est donc que la bataille n'était pas perdue."
Faux. Le chiffre cité par le président de la République est nécessairement faux... Parce qu'il est incalculable. Ce chiffre n'est d'ailleurs pas revendiqué par la Hadopi elle-même : dans son premier rapport d'activité, le secrétaire général de la Haute Autorité, Eric Walter, note que "les données montrant la baisse des échanges français de fichiers non autorisés sur les réseaux pair à pair publiées par les ayants droit tendent à corroborer ces résultats, même s'il ne faut pas méconnaître les éventuels effets de bord tels que la dissimulation, ou encore le déplacement des usages non autorisés vers d'autres solutions que le pair à pair (streaming, direct download)".
Par ailleurs, le P2P ayant également de nombreuses applications légales, il n'est pas possible de déduire d'une baisse ou d'une augmentation du traffic P2P une baisse ou hausse du téléchargement illégal sur ces réseaux. La part du P2P dans l'ensemble du traffic Internet est structurellement en baisse depuis plusieurs années, selon les différentes études sur le sujet ; c'est désormais la vidéo en streaming (légal comme illégal) qui représente la plus importante source de trafic.
"Plus ça va, plus les internautes comprennent [qu'il ne faut pas télécharger illégalement]."
Plutôt vrai. Selon un sondage commandé par la Hadopi, 41 % des internautes sondés affirment que la Hadopi les a incités à changer leurs habitudes de consommation ; dans ce sous-ensemble, 38 % des sondés affirment avoir cessé de télécharger illégalement. Ce qui pourrait signifier que 15 % des internautes ont cessé de télécharger sous l'impulsion de la Haute Autorité. Mais le sous-échantillon de sondés est trop faible pour que le chiffre soit fiable, et en l'absence d'autres études d'ampleur sur le sujet, il est impossible d'être plus précis.
Autre élément de contexte : si les abonnements aux services légaux de streaming musical progressent, laissant entendre que, dans certains cas, l'offre légale convainc les internautes, l'offre en matière de films reste faible. La Hadopi affirme d'ailleurs que sa priorité est aujourd'hui le développement de l'offre légale.
"Mais sur les sites de streaming, l'idéologie du partage, excusez-moi : c'est l'idéologie de l'argent ; je vole d'un côté et je vends de l'autre. Personne ne peut soutenir cela."
Plutôt vrai, mais... Les sites de streaming forment une galaxie complexe ; on y trouve aussi bien de petits sites de passionnés, sans publicité, que des sites clairement commerciaux. Plusieurs procédures judiciaires sont en cours contre des sites qui gagnaient de l'argent en affichant des publicités sur les pages où ils proposaient films ou séries en streaming. Mais ce constat est également vrai pour les annuaires de liens BitTorrent, ou pour les catalogues de liens de téléchargement direct ; quel que soit la technologie utilisée, les sites donnant accès à des téléchargements illégaux ne sont pas tous commerciaux, ni tous mus par "l'idéologie du partage".
En revanche, le streaming (comme le téléchargement direct) est différent du P2P de par son caractère centralisé. Dans un système P2P, ce sont les internautes qui fournissent eux-mêmes la bande passante nécessaire à la diffusion des fichiers. Pour le streaming, c'est un service central qui héberge et diffuse les vidéos. Certains services de streaming comme YouTube ou Dailymotion ont mis en place de nombreuses barrières pour éviter de diffuser des contenus protégés ; d'autres, comme Megavideo, sont accusés par les ayants droit de faciliter le visionnage illégal de contenus.
"Certains d'entre vous se sont inquiétés quand j'ai dit que j'étais prêt à un Hadopi 3. J'ai bien conscience que la technologie évolue. Ce qui compte, c'est de protéger les droits d'auteur. Si la technologie nous permet une nouvelle évolution, eh bien on adaptera la législation."
Plutôt faux, mais... La technologie n'a pas évolué depuis la mise en place de la Hadopi. Le streaming (comme le téléchargement direct) existaient déjà au moment des débats sur la loi. Il s'agissait d'ailleurs d'un des arguments fréquemment avancés par les adversaires de la Hadopi : cette dernière ne pouvant surveiller que le téléchargement en P2P, elle se révélerait forcément peu efficace, estimaient-ils. En réalité, ce sont les usages qui ont évolué : les sites de streaming et le téléchargement direct ont connu une progression nette, possiblement liée à la mise en place de la Hadopi et au report d'une partie du téléchargement illégal vers ces plates-formes que la Haute Autorité ne surveille pas pour l'instant.
Les propos de Nicolas Sarkozy conservent cependant une certaine ambiguïté : le président de la République pourrait également faire allusion à l'évolution des technologies de blocage ou de surveillance. Là encore, les technologies ont peu évolué, mais une première expérimentation de blocage de sites a été permise par la mise en place de l'Arjel, l'autorité des jeux d'argent en ligne, qui dispose du pouvoir d'imposer aux FAI le blocage des sites de paris ou de poker qui ne disposent pas d'un agrément.
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