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La suite :
- Chantal Jouanno ouvre une enquête :
La ministre des sports Chantal Jouanno demande à la Fédération française de football (FFF) de «faire toute la lumière», après les révélations de Mediapart jeudi 28 avril sur la mise en place d'une politique discriminatoire visant à réduire le nombre de joueurs noirs et arabes au sein des équipes de France de foot. «C'est inimaginable parce que c'est contraire à l'histoire et à l'esprit de la Fédération française de foot, c'est surtout contraire à la loi et à la constitution», a réagi la ministre le soir même sur LCI.
De plus, a-t-elle poursuivi, «c'est fondamentalement contraire à l'esprit du sport parce que dans le sport, la seule sélection qui vaille, c'est les qualités sportives du joueur d'une part, et d'autre part leur éthique et leur respect du maillot. Ce n'est pas dépendant des origines, de la couleur de la peau».
La ministre indique par ailleurs dans un communiqué prendre acte « du démenti de la FFF quant à l'existence d'une telle politique et l'invite à faire très rapidement toute la lumière sur les allégations de l'article ».
Dès jeudi soir, Chantal Jouanno ouvrait la voie à une possible inspection de ses services au sein de la FFF. Elle l'a confirmé vendredi 29 avril au matin, sur l'antenne de RMC : elle va d'abord convoquer François Blaquart, le directeur technique national de l'équipe de France. Surtout, «nous allons mettre en place une mission d'inspection de la Jeunesse et des Sports pour avoir un regard neutre sur l'affaire», a déclaré la ministre.
Pape Diouf dénonce le racisme du foot français
Après la gravité des faits révélés par Mediapart, la gêne est plus que perceptible au sein des instances du foot français.
«Je suis surpris de cette information. Il faut demander à François Blaquart» (NDLR : le directeur technique national), a déclaré le président de la fédération Fernand Duchaussoy. «Il y a eu une intervention la semaine dernière du Conseil fédéral et il n'a jamais été question de cela. Cela me choque.»
Autre réaction très embarrassée, celle de Francis Smerecki, le sélectionneur des moins de 20 ans. «J'apprends la nouvelle. On a eu des discussions mais elles portaient seulement sur la binationalité de certains joueurs. Après, je ne savais pas qu'il y avait une directive qui existait», a-t-il déclaré.
«Laurent Blanc récuse ces propos ineptes et contraires à sa philosophie», a déclaré pour sa part le chef de presse de l'équipe de France, Philippe Tournon, le 28 avril à l'AFP. «Laurent Blanc est outré que l'on puisse le mettre en cause de la sorte, toute discrimination étant insupportable à ses yeux.» Selon Philippe Tournon, la «réflexion» en cours au sein de la FFF serait «qu'on a plein de joueurs à la double nationalité chez les jeunes et qu'ensuite certains ne veulent pas aller en équipe de France. C'est un choix, il faut l'assumer. Mais ces problèmes n'ont pas été évoqués au conseil fédéral».
André Merelle, l'ancien directeur de l'Institut national de formation (INF) de Clairefontaine, confirme pour sa part sur l'antenne de RMC que la direction technique nationale (DTN) de la FFF a employé des méthodes suspectes pour diminuer le nombre de joueurs d'origine nord-africaine et subsaharienne dans les centres formation. «Oui, c'était sous la direction de Gérard Houllier. Il n'y avait pas de quotas à proprement parler, mais des réflexions sur le nombre de blacks et de beurs. Selon eux, dont François Blaquart, il y en avait un trop grand nombre, enchaîne-t-il. Moi je ne comprenais pas pourquoi il y en avait trop par rapport à nos pauvres petits blancs. Mais il faut se rendre à l'évidence, les meilleurs étaient ceux qui étaient en banlieue.»
En revanche, Henri Emile, le coordinateur de l'équipe de France, n'a pas caché sa surprise. «Laurent Blanc et l'ensemble des membres de la DTN peuvent être choqués par des jeunes internationaux qui vont ensuite dans un pays étranger, a-t-il réagi. Mais il n'y a jamais eu de réflexion négative avec des quotas. C'est impensable.»
Interrogé sur les révélations de Mediapart, Pape Diouf a pour sa part avoué ne pas avoir eu connaissance de cette affaire. Mais l'ancien président de l'OM – qui est à ce titre l'un des très rares noirs à avoir eu des responsabilités importantes au sein du foot français – a expliqué sur RMC qu'il n'était pas étonné par de telles pratiques, qui représentait l'état d'esprit du football français, et de sa société par la même occasion.
« J'ai pris connaissance de ce débat qui, à mon avis, est un faux débat. Savoir si la réunion dont on parle a eu lieu ou non me paraît complètement superflu. Je ne dis pas si elles sont vraies, mais je ne suis pas étonné par ces révélations. La vérité est la suivante. Le football français est à l'image de sa société. Le football français est raciste, il exclut », a déclaré Pape Diouf.
- Discriminations dans le foot : un premier dossier pour le nouveau Défenseur des droits :
Les discriminations dans le football français devraient faire l'objet d'une des toutes premières enquêtes du nouveau Défenseur des droits qui va prendre ses fonctions lundi 2 mai 2011. C'est en tout cas ce qu'a avancé Éric Molinié, le président de la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité (Halde) en rendant public le dernier rapport annuel de cette instance qui fusionne avec le médiateur de la République, le Défenseur des enfants et la Commission nationale de déontologie de la sécurité. Avec l'enquête de Mediapart, «il y a tout a priori pour caractériser une discrimination, à savoir une différence de traitement liée ici à l'origine», a-t-il indiqué, lors d'une conférence à l'issue d'une rencontre avec Nicolas Sarkozy. «Il faut regarder le sujet dès lundi et faire une enquête (...). S'il s'avère qu'il y a une différence de traitement sur un des 18 critères de discriminations établis par la Halde, alors il peut y avoir saisie ou autosaisie», a-t-il précisé.
Plusieurs associations de lutte contre le racisme et les discriminations ont souligné la «gravité» des faits révélés «s'ils sont avérés», comme l'a souligné la Ligue des droits de l'Homme (LDH) dans un communiqué. «Ils corroborent le sentiment que la Fédération française de football (FFF) contourne la loi, se comporte comme une puissance indépendante qui agit selon son propre règlement. La FFF considère que sa puissance et son statut lui donnent la possibilité de créer son propre droit», regrette-t-elle, ajoutant que ces informations «s'ajoutent à l'attitude de la Fédération française de football qui organise le refus de délivrance de licence aux mineurs étrangers ayant moins de cinq ans de présence en France. Officiellement, cette règle établie par la Fifa et appliquée par la FFF a pour but d'empêcher le trafic de jeunes joueurs étrangers. Dans la réalité, elle conduit à interdire à des jeunes, parce qu'étrangers, de jouer au football dans le cadre de clubs reconnus».
Tandis que la LDH demande qu'une enquête soit diligentée par le parquet de Paris, le Conseil représentatif des associations noires (Cran) exige une commission d'enquête parlementaire sur le racisme dans le sport, en plus de «sanctions exemplaires». «Cette affaire est étonnante mais pas surprenante car il y a en France une libération de la parole raciste au plus haut niveau de l'État», indique Patrick Lozès, le président du Cran. «Cette fois-ci, on est au-delà de la banalisation d'une parole raciste. Il s'agit de politiques racistes. L'extrême droite est-elle à la tête de l'équipe de France de football?», s'interroge-t-il.
Le président de la Ligue internationale contre le racisme et l'antisémitisme (Licra), Alain Jakubowicz dénonce lui la «racialisation des discours de ces dirigeants du foot», à l'image selon lui «de la tendance à l'ethnicisation et la communautarisation de la société». Il lie cette affaire qu'il qualifie de «FFFgate» au «syndrome Messi, le nouveau Dieu du foot mondial». «Sa réussite sert à justifier le fait qu'on n'aurait plus besoin de gros blacks bodybuildés, mais qu'il faudrait des petits blancs bien malins. Tous ces stéréotypes sont effroyables», estime-il, ajoutant qu'«il est bon que la lumière soit faite sur tous ces non-dits».
Tout comme le Cran, la Licra, qui a conclu des partenariats avec des clubs et est présente dans les conseils de discipline du foot amateur, se déclare prête à porter l'affaire devant la justice, l'une et l'autre plaidant en faveur d'un renforcement des moyens financiers alloués à la lutte contre le racisme et les discriminations.
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