Diogene a écrit:
Teaser : je prépare un post sur le cycle Jack Taylor de Ken Bruen pour fin août. C'est vraiment du très très très bon.
Nous y voilà.
Ken Bruen est un auteur irlandais un peu confidentiel mais pourtant très prisé des initiés. La Série Noire ne s'y est pas trompée et balance à la pelle l'ensemble de son oeuvre.
Bruen mène pour l'essentiel deux cycles de front :
- R&B (pour Roberts et Brant) deux flics pourris de Londres.
- Les enquêtes de Jack Taylor
C'est de Jack Taylor dont je vais vous parler. Les 5 romans sont donc initialement sortis à la Série Noire et pour le moment les 3 premiers volumes existent en Folio Policier.

Remarquez le changement de format que j'ai explique dans un post précédent :
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Diogene a écrit:
...La diffusion estivale de ces polars m'a donné l'idée de faire une courte généalogie de la série noire afin de mieux comprendre la diffusion des Suite Noire sur France 2 et d'aider les néophytes chez le bouquinistes.
Vous pouvez bien entendu vous reporter au
site de Gallimard ou à
l'article wikipedia.
Au delà de l'aspect historique tout est une histoire d'évolution de format.

Le format classique de la série noire c'est le "6" : fond noir, typo jaune, pas d'illustration, format poche, est n° sur la tranche.
On trouvera par la suite des liserets jaunes avec illustration dessin (2) ou photo (3) tirée généralement de l'adaptation cinématographique.
Autours de la série noire gravitent des collections cousines comme le carré noire (1), série noire futuropolis (2) - il s'agit du roman illustré, ou encore la super noire (5).
Au début des années 2000, la série noire adopte un format mi-poche (7) avec une jolie maquette : photo en noir et blanc, on touche pas à la typo jaune et on garde le n° de série sur la tranche.
Aurélien Masson qui dirige la collection depuis 2005, devant faire face à la concurrence (surtout
Rivages/Noir) opère une révolution : on adopte le grand format ( 8 ) : la maquette est toujours très soignée mais les puristes regrettent le format poche et la disparition du n° de série sur la tranche.
Les formats 1 à 7 se dénichent sans trop de problème chez les bouquinistes (et encore moins les formats poche). Par contre, pour les grands formats, faut s'accrocher ou aller sur Paris chez Gibert par exemple.
Sinon, sachez qu'en poche, les romans de la série noire sont au catalogue de
Folio Policier (jolie maquette parfois barrée d'un ignoble "thriller").
Les trois premiers volumes sortis en Folio :
Bruen, K. (2004).
Delirium Tremens, Gallimard / Série Noire.
Il n’y a pas de détectives privés en Irlande. Les habitants ne le supporteraient pas. Le concept frôle de trop près l’image haïe du mouchard. Jack Taylor le sait. Viré pour avoir écrasé sciemment son poing sur le visage d’un ministre, cet ancien flic a gardé sa veste de fonction et s’est installé dans un pub de Galway. Son bureau donne sur le comptoir. Il est chez lui, règle des broutilles, sirote des cafés noyés au brandy et les oublie à l’aide de Guinness. Il est fragile et dangereux. Une mère qui ne croit pas au suicide de sa fille de seize ans le supplie d’enquêter. « On l’a noyée » sont les mots qu’elle a entendus au téléphone, prononcés par un homme qui savait. De quoi ne plus dormir. Surtout si d’autres gamines ont subi le même sort. Surtout si la police classe tous les dossiers un par un…
Bruen, K. (2004).
Toxic Blues, Gallimard / Série Noire.
Jack Taylor, l’ancien flic de Galway reconverti en privé dans un pays qui ne supporte pas cette profession, revient dans sa ville natale. À peine a-t-il le temps de retrouver ses marques, les dealers divers et les pubs gorgés de soiffards, qu’il croise un chef tinker. Ces gens du voyage, sans être tsiganes, passent leur vie sur les routes d’Irlande. Tout le monde s’en méfie. Peu de gens les aident. Des jeunes hommes du clan, depuis quelques semaines, sont pourtant tués et mutilés sans que la police ne bouge. Quatre au total. Taylor, marginal à sa façon, le nez dans la poudre et la Guinness, accepte le marché. Nourri et logé en échange de son travail, il va, très loin des bars branchés du centre-ville, partir bille en tête affronter le chaos.
Bruen, K. (2006).
Le Martyre des Magdalènes, Gallimard / Série Noire.
Lessivé, rincé par sa dernière enquête, Jack Taylor tente d’en faire passer le goût amer en éclusant des pintes de Guinness au comptoir de son pub préféré. Alors qu’il répète à qui veut bien l’entendre qu’on ne l’y reprendra plus, Jack est sommé par un caïd local de retrouver « l’ange des Magdalènes ».
Contraint et forcé d’accepter afin de s’acquitter d’une dette d’honneur, Jack se retrouve au cœur d’un fait divers des années 1960, et croise bientôt les fantômes des « Magdalènes », des filles-mères reniées par leurs familles, exploitées dans des couvents catholiques où elles lavaient leurs péchés en travaillant comme blanchisseuses.
Hanté par ses échecs passés, poursuivi par une police locale qui lui cherche constamment des crosses, Jack va tenter de retrouver cet « ange », une mystérieuse femme qui serait venue en aide à ces pauvres filles mises au ban de la société. Cependant, comme l’alcool, la vérité est bien souvent trompeuse. Gare au retour de flamme. Ce qui s’annonçait comme une mission rédemptrice va vite se transformer en chemin de croix. Le martyre de Jack Taylor ne fait que commencer…
Bruen, K. (2007).
Le Dramaturge, Gallimard / Série Noire.
L’impossible s’est finalement produit. Jack Taylor ne se drogue plus, il ne boit plus. Même les clopes semblent parties en fumée. Il sort avec une femme qui est presque de son âge et s’il ne peut encore se considérer comme un citoyen ordinaire, il flirte avec cette illusion. Certains prétendent même qu’il va à la messe…
Malheureusement, le monde autour de Jack, lui, n’a pas changé : deux étudiantes sont retrouvées mortes à quelques jours d’intervalle. Dans les deux cas, un exemplaire d’une œuvre de John Millington Synge est découvert sous le corps des jeunes victimes. Très vite, sourd aux appels de sa raison qui lui dicte de faire demi-tour, Jack se met en chasse de cet assassin froid et calculateur.
Alors que son passé s’apprête à ressurgir et que l’Irak s’enflamme, Jack Taylor oscille à l’extrême bord du précipice…
Bruen, K. (2008).
La Main Droite du Diable, Gallimard / Série Noire.
La Main Droite du Diable promet tout hormis l’absolution…
L’Irlande, noyée sous l’afflux des devises et livrée à la cupidité, ne se tourne plus vers l’Église, en quête de réconfort et de consolation. Mais la décapitation du père Joyce dans un confessionnal de Dublin horrifie les citoyens les plus blasés.
Jack Taylor, que le traumatisme lié à la perte d’un être cher vient d’anéantir, s’est toujours considéré comme à mille lieues d’une éventuelle rédemption. Un travail insolite lui offre pourtant un nouveau départ, et une surprenante association lui permet d’entrevoir que l’unique rêve qu’il poursuit encore éperdument, celui d’une famille, peut encore se réaliser.
Quand se mêlent exorcisme inquiétant, prédateur qui rôde et attirance hautement improbable, tout l’entraîne à sombrer dans un sombre réseau de conspirations. Le spectre d’une enfant hante chacune des heures qui échappe au sommeil.
Je vais pas vous détailler chacun des 5 romans mais plutôt vous filer quelques traits importants de ce cycle pour vous donner l'envie de vous plonger dans cette perle noire.
Jack Taylor vit à Galway : Ken Bruen n'est pas le premier à adopter la trame classique du (anti)héros récurrent évoluant dans un lieu privilégié : Harry Bash est à LA (Connelly), Qtrange et Quinn à Washington/Baltimore (Pelecanos), Adamsberg pour l'essentiel à Paris (Vargas), Erlendur à Reykjavík (Indridason), Wallander à Ystad (Mankell) ect.
Galway est une petite ville typique de du nord-ouest de l'Irlande. Dans les romans de Bruen on comprend la montée du libéralisme, comment l'irlande archétypale devient le celtic Tiger.
Jack Taylor est un privé : Ancien Gardai (flic irlandais), la cinquantaine, Jack Taylor est reconverti en privé. Si on lui confie des enquêtes, il les subit plus qu'il les mène parce que Jack est un looser. En effet...
...Jack Taylor boit... , mais il fume aussi, se drogue à l'occasion bref, passe son temps à s'auto-détruire. Les moments de lucidité sont rares.
Jack Taylor lit : Jack aime les romans noirs, la poésie et la philosophie. Chaque chapitre s'ouvre sur la citation d'un auteur et Jack a souvent des réminiscences d'auteurs lus. Quand on lit un Jack Taylor, c'est 100 livres qu'on découvre. Mais Jack écoute aussi de la musique, parle cinéma, football, séries télé de HBO par moment... Bref, de quoi découvrir plein de trucs.
Une enquête de Jack Taylor est une plongé en apnée (sans avoir pris son souffle) dans une Irlande plus noire que verte. Faut dire qu'il pleut sur Galway mais par moment pointent quelques éclaircies.
Si par cette légère évocation je ne suis pas parvenu à vous convaincre de vous essayer aux enquêtes de Jack Taylor, sachez que JB Pouy (largement évoqué dans ce sujet) a déclaré que
la main droite du diable était l'un des romans les plus sombres et les plus marquant qu'il avait lu ces 20 dernières années :
"
La main droite du diable est proprement insoutenable. Non pas par l'horreur des motifs, mais par l'insondable tristesse qui se d"gage de l'ensemble. Et pourtant jack Taylor parvient à ne pas boire et à ne pas fumer pendant tout le roman. Ce qui se trouve, pour le lecteur, être bien pire que s'il se torchait à fond en toussant comme un malade. Pendant tout le temps de la lecture, on a envie de lui dire : allez ! Vas-y! Bois un coup! Ca va te faire du bien! Sûr ! "
JB Pouy : Une brève historie du Roman Noir.
Dernière chose, préférez bien entendu vous bouffer le cycle dans l'ordre.