La Turquie n'a pas été désignée organisatrice de l'Euro 2024 jeudi, l'Allemagne lui ayant été préférée par l'UEFA. Ce n'est pas le premier raté turc de ces dernières années.
Euro 2016
Après avoir manqué l'organisation de l'Euro 2008 et de l'Euro 2012, la Turquie y croit fort pour 2016. Elle se présente sur la ligne de départ en face de la France et de l'Italie, la candidature commune de la Suède et la Norvège s'étant retirée en décembre 2009. Le 28 mai 2010, le vote a lieu et deux tours sont nécessaires pour désigner le pays hôte. Au premier, l'Italie est éliminée avec 23 voix seulement, contre 43 pour la France et 38 pour la Turquie. Et au deuxième, le comité exécutif de l'UEFA choisit la candidature tricolore pour seulement une voix (7-6).
Organisateur des Championnats du monde d'escrime 2009, des Championnats du monde de basket 2010, de la finale de la Ligue des champions 2005 et de la finale de la Coupe de l'UEFA 2009, la Turquie échoue encore une fois à décrocher son Graal, malgré un dossier fort et le soutien de son président Abdullah Gül. La réaction du pays est évidemment mauvaise, et pointe du doigt l'UEFA et son président, Michel Platini, pour son lobbying anti-turc. «Nous avons l'impression que l'on nous envoie un message politique, comme si l'on voulait nous dire que nous ne sommes pas assez Européens pour organiser l'Euro», déclare ainsi un journaliste sportif, Yakir Mizrahi.
Jeux Olympiques 2020Dans sa volonté de prouver qu'elle peut organiser des événements sportifs de grande ampleur, la Turquie, avec Istanbul, se présente à l'organisation des Jeux Olympiques 2020, sa cinquième candidature après 2000, 2004, 2008 et 2012. Mais son échec de l'Euro 2016 ne joue pas en sa faveur. La plus grande ville du pays est opposée à Bakou, Doha, qui ne sont finalement pas retenues par le CIO, Madrid et Tokyo. En septembre 2013, Istanbul atteint encore une fois le second tour du vote, après l'élimination de Madrid au premier tour bis. Mais face à la capitale Japonaise, la ville turque est largement battue (60-36). Après le choix de Rio pour 2016, le CIO préfère ne pas explorer une nouvelle terre pour ses JO et revient donc à Tokyo, déjà ville hôte en 1964.
Encore un raté pour le deuxième pays le plus peuplé d'Europe, qui paie certainement ses problèmes politiques internes : la répression violente des manifestations qui ont agité plusieurs villes deux mois avant le vote a sans doute fait du mal. Et la personnalité de son président Recep Tayyip Erdogan est également clivante. Il se veut néanmoins bon perdant dans sa réaction : «Le CIO a sans doute pris une telle décision parce qu'il a estimé que nous n'étions pas encore prêts pour les JO.» «Il y avait une candidature évoquant plutôt la tradition et la stabilité et une autre candidature évoquant l'envie de nouveaux rivages, explique de son côté l'Allemand Thomas Bach, vice-président du CIO et futur successeur de Jacques Rogge. Cette fois-ci, les membres du CIO - dans un monde fragile - ont décidé en faveur de la tradition et de la stabilité».
Euro 2024
En avril 2014, la Fédération turque renonce à se positionner pour accueillir une demi-finale ou la finale de l'Euro 2020, qui va se dérouler dans toute l'Europe, privilégiant la possibilité de candidater à l'organisation de l'Euro 2024. En février 2017, la candidature est confirmée, avec neuf villes : Ankara, Antalya, Bursa, Eski?ehir, Gaziantep, Istanbul, Izmit, Konya et Trabzon. Un seul pays lui fait face, l'Allemagne, qui a déjà accueilli l'Euro en 1988, ainsi que la Coupe du monde en 1974 et 2016. Ce jeudi à Nyon, sur les 17 membres du comité exécutif de l'UEFA, 12 ont voté pour l'Allemagne au premier tour, la Turquie ne recevant que quatre votes. Ironie des agendas, ce même jour, le président Erdogan se trouve en visite d'État en Allemagne pour s'entretenir avec la chancelière Angela Merkel. On ne sait pas s'il l'a félicitée.
Dans sa première réaction, le ministre turc des Sports Muharrem Kasapoglu s'est lui montré plus que déçu : «C'est désolant pour l'UEFA et pour l'Euro 2024 que notre pays ne l'ait pas obtenu en dépit de toutes ses forces. Nous n'avons rien perdu en tant que pays. C'est l'Euro 2024 qui perd notre expertise et notre hospitalité». Une fois encore, la situation interne en Turquie a joué en sa défaveur. Dans son rapport d'évaluation des candidatures publié vendredi dernier, l'UEFA avait exprimé une «préoccupation» au sujet de l'absence d'un «plan d'action» en faveur des Droits de l'homme dans le dossier turc.