Inscription: 31 Aoû 2005 22:06 Messages: 55026 Localisation: La Forêt-Fouesnant, Mecque des navigateurs.
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Une interview intéressante de Yann Elies. https://www.ouest-france.fr/vendee-glob ... is-7120769A moins d'être abonné vous n'avez sans doute qu'un extrait donc je vous mets un copié-collé. - Cliquez ici pour faire apparaître le contenu caché
Yann Eliès, quels enseignements avez-vous pu retirer de cette fin de remontée de l’Atlantique-sud ?
On a pu jauger le potentiel des bateaux à différents angles de vent. Aux angles serrés c’est kif-kif surtout autour de 70 degrés, en revanche dès que le vent ouvre un peu, entre 70 et 90 ° d’angle, cela devient plus favorable à Louis Burton, Yannick Bestaven et Boris Herrmann. Ce qui peut laisser un peu d’espoir à Charlie, malgré son foil bâbord récalcitrant.
Comment ça ?
Au reaching (vent de travers) la différence peut être de deux nœuds. Ce qui, sur 24 heures, fait une grosse différence d’environ 50 miles par jour. Mais la remontée ne sera pas forcément autant au reaching qu’on l’annonce. Après la sortie du pot-au-noir, plus on monte plus l’angle de vent se rétrécit, jusqu’à 60 degrés du vent c’est quasiment du près.
Comment se passe le pot-au-noir ?
On disait que le pot au noir serait un peu plus simple dans la remontée mais ce n’est pas si évident car on peut apercevoir, sur les cartes radar, des petits grumeaux dans les champs de vent. Moi, mes routages me font dire qu’ils vont plus à l’est pour avoir un meilleur angle à la sortie. J’ai fait des routages mais c’est toujours délicat à cet endroit. Je pense qu’ils vont passer plus de temps que la situation ne le prévoyait et dans le pot-au-noir, plus tu restes moins c’est bien. Je pense qu’il faudra attendre lundi matin pour tirer plus de conclusions.
Un flux dépressionnaire le 22 janvier Et à la sortie quelle est la stratégie la plus pertinente ?
A la sortie du pot au noir, on sera dans une situation où ça vaut le coup d’attaquer et de cravacher. Car, d’ici vendredi 22, il faut arriver à attraper un flux qui se situe assez bas ce qui veut dire que l’anticyclone est centré entre les Canaries et les Açores. C’est un flux de sud-ouest avec un front perturbé qui vient pousser l’anticyclone vers les Canaries celui qui l’accrochera pourra se barrer tout seul.
Avant, il y a quand même la traversée des Alizés de Nord-Est qui s’annonce musclée…
Ils vont entrer dans les alizés de l’hémisphère nord lundi. Ce sont, en effet, des alizés costauds assez forts entre 20 et 25 nœuds. Il faudra trouver le bon dosage entre aller vite et préserver le bateau, le tout dans un angle assez fermé, environ 70 degrés et une mer casse-bateau. Je ne serai pas surpris qu’on en perde un ou deux d’ici l’arrivée.
Quels sont les atouts des uns et des autres dans cette remontée ?
Les foilers qui ont leurs foils seront évidemment avantagés. Je pense à Boris, Louis et Yannick. Charlie a plutôt bien résisté avec son foil bâbord récalcitrant, et je pense quand même qu’il peut sortir son épingle du jeu dans des conditions serrées.
Pensez-vous que Boris Herrmann puisse faire la différence avec ses grands foils ?
Je ne sais pas. J’étais déçu de ne pas le voir avant aux avant-postes. Est-il le favori ? S’est-il préservé jusqu’à présent et que c’est désormais son heure ? Il a tout pour réussir, mais moi ça fait 60 jours que je l’attends.
Le plus important n'est-il pas avoir son bateau à 100 % dans cette remontée de l’Atlantique
C’est certain, et là, je pense en revanche que tout le monde marche à cloche-pied. La plupart des leaders ont été transparents jusqu’à présent, le seul qui ne s’est pas trop étendu là-dessus c’est Charlie. On sait juste qu’il ne peut pas totalement s’appuyer sur son foil bâbord. Louis Burton est très à l’aise et est très étonnant. Ce sera peut-être une victoire par élimination et réglée par les avaries. Il faut aussi prendre en compte les bonifications. C’est un peu tôt maintenant mais on pourra commencer à les intégrer à la situation quand ils arriveront près de l’anticyclone des Açores. Pour Boris et Yannick c’est quand même un petit joker. Et des jokers c’est mieux d’en avoir que pas du tout
Sutout que les conditions ne seront pas forcément clémentes tout du long…
Et non ! Il faut noter aussi que la dépression qui arrive au nord des Açores vers le 25 janvier, c’est du rouge, du très rouge même sur les fichiers ! Ce qui veut dire des rafales à 50 nœuds donc il va falloir gérer, on sera à trois journées de l’arrivée aux Sables d’Olonne. Pour l’instant je vois une arrivée entre le 27 l’après-midi et le 28.
En résumé qui sont vos favoris ?
Mon favori de cœur, c’est Charlie évidemment ! Mais je crois quand même qu’il aura du mal à résister à Louis, Yannick et Boris. Yannick peut encore gager même s’il est encore derrière à condition qu’il revienne vite dans le match. Je dois aussi dire qu’il y a un autre scénario qui donne un regroupement général le 21 ou le 22 où ils resteraient tous bloqués dans l’anticyclone. Dans le premier scénario, c’est les « Evadés d’Alcatraz », dans le second, c’est « le Train sifflera trois fois ».
Peut-on s’accorder pour dire que l’enchaînement des systèmes météo n’a pas été favorable aux foilers…
Oui, mais depuis trois éditions, on était sur la conviction qu’il fallait un bateau neuf pour gagner. Or, cette fois-ci on s’aperçoit que le temps de développement et de préparation des nouveaux bateaux est beaucoup plus long qu’avant. Il faut compter environ trois ans. L’idéal serait donc de construire un bateau dès la fin du Vendée Globe, un peu comme Jérémie Beyou l’a fait, il était dans le bon timing dommage qu’on n’ait pas pu le voir à l’œuvre,
Pour 2024, un foiler 2022 fiabilisé C’est quoi la meilleure solution selon-vous ?
La solution la plus sage, la plus sûre, la moins coûteuse et finalement la plus rentable est probablement d’acheter un bateau de la dernière génération et de prendre le temps de fiabiliser et de le maîtriser. Je pense que c’est ça le bon combo. Là, la préparation a été tronquée par le confinement. Certains avaient fait deux paires de foils mais n’ont pas eu le temps de les développer.
C’est ce que vous feriez si vous vous engagiez sur le prochain Vendée Globe en 2024
Oui, on est un peu déçu des bateaux de dernière génération certes, mais, déjà sur la transat Jacques Vabre, on avait trouvé que l’on était trop à la merci de l’état de la mer. Pour autant, on ne va tout remettre en cause. La révolution est en marche. Il faut juste que les foilers dernière génération revoient leur copie pour qu’ils soient plus fiables et qu’ils passent mieux dans la mer.
C’est une des leçons que vous tirez déjà de ce Vendée Globe ?
En effet, et une autre leçon de ce Vendée Globe, c’est que la mixité des budgets et des projets fonctionne. C’est bien que tout le monde puisse jouer. Le pari de l’Imoca, qui était de faire cohabiter tout çà est réussi. Je pense aussi que dans l’avenir, il faut mettre un terme à la flambée des coûts. Pour 2024, il faudrait que Vendée Globe reste abordable aux PME.
Si vous deviez choisir un des bateaux, ce serait lequel ?
Je pense un Charal ou un Hugo Boss, un bateau de 2020 de ce genre-là que l’on pourrait retravailler.
Vous confirmez que vous êtes candidat pour le prochain Vendée Globe ?
Oui bien sûr, j’étais un peu déçu de ne pas arriver à monter un projet pour cette édition. Je me suis posé pas mal de questions, mais vu le scénario de celui-ci, ça me redonne envie d’y aller quel que soit le bateau. Qu’il soit très bon ou pas. Je prends conscience qu’il n’est pas forcément nécessaire d’avoir un bateau dernier cri pour faire un bon Vendée Globe et ça c’est beau finalement.
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