Patrice Garande, le départ du mal-aiméL’entraîneur du SM Caen, en fin de contrat, ne vivra pas une 7e saison sur le banc. Sa fin de mandat a été très difficile, mais son bilan chiffré est l’un des meilleurs de l’histoire du club, avec notamment une montée et quatre maintiens consécutifs.
Il y a Féret, Da Silva, Vercoutre, Bessat, Ait Bennasser, Nkololo, Le Joncour, Leborgne, Bazile, Dreyer. Autant de joueurs en fin de contrat qui, sauf surprise, vont partir. Il y a un staff, également en fin de bail. Branger, Petereyns, Huriez. Et bien sûr Patrice Garande.
L’ancien buteur n’atteindra pas les 7 saisons à la tête de l’équipe première, comme son prédécesseur Franck Dumas entre 2005 et 2012. Samedi soir, il a confirmé son départ. Il a remercié les joueurs, son staff, à peu près tout le monde, au cours d’un long monologue (lire sur ouest-france.fr).
Il l’a justifié par l’épisode de la crise de gouvernance qui a poussé dehors Jean-François Fortin, l’homme qui l’avait rapatrié de Cherbourg en 2005 pour devenir l’adjoint de Dumas, après une première expérience de n°2 entre 1995 et 1998.
« J’ai une histoire avec cet homme, une réelle amitié. Dans mon métier, il faut toujours quelqu’un qui vous tend la main, moi ça a été Jean-François Fortin. On s’est vu vendredi avec le nouveau président. Je lui ai dit que je ne pouvais plus être l’entraîneur, compte tenu de ce qui s’est passé avec Jean-François. Il faut avoir la reconnaissance du ventre. »
« Monter en 2 ans, rester 5 ans en L1, c’est un exploit » :
Une déclaration de sortie sincère sur Fortin, mais forcément surprenante sur son poste, qui contredit la démarche interne. Selon nos informations, la direction se dirigeait très clairement vers un changement d’entraîneur. Plusieurs noms ont été évoqués (lire notre édition de vendredi).
Philippe Montanier aurait même décliné une proposition, ce que Gilles Sergent, qui apprécie l’homme Patrice Garande, a fermement démenti en affirmant qu’aucun contact n’avait été pris avec quiconque.
Mais peu importe au fond. La conclusion demeure. C’est ainsi, Patrice Garande nage dans les paradoxes depuis la saison dernière.
Son bilan sportif, auréolé d’un demi-finale de Coupe de France et d’une 7e place en 2015, est quasi inattaquable. C’est juste le meilleur depuis Daniel Jeandupeux dans les années 90. « Monter en deux ans et rester cinq ans en L1, c’est un exploit, je le maintiens, compte tenu du budget et des effectifs qu’on a eu chaque année », n’a pas manqué de souligner l’intéressé.
« Dans le foot, ce sont les résultats qui font le bilan, et je ne peux que le féliciter, a dit Damien Da Silva. Il y a eu des hauts et des bas, mais c’est du bon travail. Avec lui, ça a aussi été compliqué à certains moments, il faut le dire. Mais on s’est toujours maintenu, c’est le principal. »
Da Silva fait référence aux accrochages qui ont opposé Garande à plusieurs joueurs. On se souvient par exemple qu’ils avaient très peu goûté l’interview qu’il nous avait accordé en mai 2017, où le coach n’avait pas manié la langue de bois pour juger des prestations de plusieurs joueurs cadres.
Ses relations avec Xavier Gravelaine se sont détériorées, aussi, et cette saison au moins, il n’a pas vraiment choisi les joueurs qui ont composé son effectif.
L’odeur de fin de cycle flottait depuis l’été dernier, quand Fortin avait été quasiment le seul à vouloir le maintenir en poste, après une saison terminée par un maintien miraculeux au Parc des Princes. Certains ont considéré qu’il faisait l’année de trop.
Une rupture l’année dernière :
Garande, bosseur invétéré, personnage entier au management contesté, n’a pas toujours réussi à transmettre aux joueurs son sens de compétiteur exacerbé, ces deux dernières saisons. Celles-ci semblent altérer au yeux du grand public la qualité des quatre premières.
Depuis l’altercation avec le kapo du MNK à la sortie du stade d’Ornano, en février 2017, sa relation avec le public était devenue difficile.
La qualité du spectacle proposée par son équipe, sérieusement à la baisse depuis deux ans, et certains choix difficilement compréhensibles pour le monde extérieur l’ont pénalisé. Rude vie que celle d’un entraîneur…
Samedi soir, encore, son nom a été sifflé. Il s’est rapidement retiré de la fête sur le terrain. « C’était mieux que Jean-François prenne cette lumière-là… Malgré tout ce qui est arrivé, j’ai beaucoup de sympathie pour les supporters. Je leur souhaite le meilleur, sincèrement, c’est-à-dire au moins aussi bien que ce qu’on a fait depuis cinq ans. »
Patrice Garande l’a dit avec la voix plus chevrotante, émue par l’idée que tout s’arrêtait là. Il part avec le sentiment du devoir accompli. En cette fin de saison, les sorties des personnages qui ont marqué à leurs façons l’histoire moderne du SM Caen sont difficiles à appréhender.