Aleph a écrit:
Rennes a prouvé hier soir que le 3-5-2 n'est pas un schéma tactique à simple vocation défensive mais peut être une arme offensive redoutable quand les joueurs mettent l'animation qu'il faut.
Avec un vrai latéral droit, un milieu créateur et un attaquant potable, Caen peut tendre vers ce résultat.
C'est évident.
La vocation "offensive" ou "défensive" et le système de jeu sont deux choses bien distinctes.
Le projet de jeu concerne la manière générale dont on veut faire jouer l'équipe dans le cadre d'un objectif défini. Assez flou sous Dumas - à cause de quelques carences tactiques - plus variable sous Garande qui se focalisait davantage sur l'objectif du maintien (qu'il restera donc le seul depuis très longtemps à avoir atteint à chaque fois), très précis sous Mercadal avant de se diluer devant les résultats ou affiché clairement avec Almeida, il donne une indication de la manière dont l'équipe compte s'y prendre, dans notre cas, une approche verticale où la déstabilisation des adversaires va se concerntrer sur la recherche des espaces dans le dos des latéraux (voir les passes offensives de Pi, très souvent entre le central et le latéral), une construction rapide vers l'avant.
C'est comme ça qu'on a joué lors de notre seule présence dans le top 10 avec Delort-Rodelin-Bazile pour jouer la profondeur.
Le système de jeu, en revanche, concerne les positions relatives des joueurs sur le terrain. 4-4-2, 3-5-2, 4-3-3, WM etc.
Le lien entre les deux, c'est l'animation: elle découle du projet de jeu et le système de jeu en est une traduction. Mais chez certains entraineurs, ça n'est pas fixe: un même projet de jeu, avec une même animation peut être servie par plusieurs systèmes.
Sous Pascal Théault, par exemple, le même projet se déclinait sur un 4-4-2 à domicile (Watier-Horlaville devant, Rothen-Derroin sur les ailes, Gallon et X dans l'axe devant une défense à 4 avec des latéraux qui jouent haut) et sur un 4-5-1 à l'extérieur (une seule pointe et un milieu supplémentaire pour l'offensif, permettant aux deux autres milieux axiaux de jouer plus bas pour densifier). Deux systèmes, un même projet.
On peut même aller plus loin en constatant facilement qu'un 4-3-3 (considéré comme très offensif il y a peu) et un 4-5-1 "classique" considéré comme très défensif ne sont que deux variantes d'un même système: la seule différence réside dans les deux ailiers, s'ils sont plus ou moins haut. Mais ça sert le même projet.
Bref, l'enjeu, c'est le projet de jeu car c'est lui qui va dire comment joue l'équipe en général. Veut-elle récupérer le ballon haut et imposer sa présence avec un pressing qui devra être puissant, très collectif et très organisé ou préfère t-elle attendre plus bas et partir dans les espaces ?
Parce qu'en gros, si tu récupères le ballon haut, tu es déjà près du but adverse, mais c'est beaucoup plus difficile à récupérer car tu dois le faire dans une zone où ton adversaire est très dense et jouera facilement vers l'arrière pour se dégager de ton pressing.
Si tu préfères attendre plus bas, ce sera plus facile car c'est toi qui le récupérera dans "ta zone de confort" mais tu sera alors très loin du but: d'où l'idée de jouer vertical pour aller très vite devant le but, avant que l'adversaire ne se replie proprement.
Et pour le faire, de nombreux systèmes sont possibles. Le vrai sujet, c'est est-ce que la verticalité est l'idée la plus pertinente pour jouer contre Chambly, par exemple. Si l'adversaire réduit ses espaces derrière et t'attend lui-même à 30m, il n'y aura aucun espace vertical à prendre s'il coulisse proprement. Après, dans les années 90, Auxerre s'est forgé tout son palmarès comme ça et face à des équipes qui se juraient de ne pas laisser d'espaces.
Après, l'effectif doit être bâti pour coller au mieux du projet. Après, c'est à l'entraineur qui a défini le projet, de construire la meilleure équipe en fonction des joueurs qu'il a, donc le système qui fera la meilleure synthèse entre le projet et l'effectif.
Mais ça ne change rien au fait que le 3-5-2 ou 5-3-2, c'est pareil, repose sur un milieu capable de se projeter très vite vers l'avant, capable de presser, récupérer et relancer très vite dans les intervalles au sol et bon sur le jeu long (vision et qualité de passe longue distance), sur des attaquants mobiles, très rapides et capables de prendre des espaces tout en déclenchant de nombreux appels dès la récupération (et capable de s'organiser, un faisant l'appel dans la profondeur quand l'autre décroche pour offrir un appui permettant à l'équipe de temporiser et remonter) et surtout sur des latéraux capables de couvrir tout un couloir: défendre en s'alignant sur les 3 axiaux et capables de se projeter eux aussi très vite vers l'avant...
La question, c'est est-ce qu'on a ça dans l'effectif ?