Interview de Reynald dans le Allez Caen du mois d'Octobre :
Défenseur agressif, technique et généreux, Reynald Lemaître a changé de dimension…
Lorsque Franck Dumas lui avait demandé de tenter sa chance au poste d'arrière latéral, Reynald Lemaître avait accepté, dubitatif et incapable de s'imaginer l'avenir. De fait, de taille médium, il est passé à la taille L et bientôt XL. "Si on m'avait dit ça il y a quelques années, jamais je n'y aurais cru…" avoue-t-il. Face à une concurrence plus dure au poste de milieu offensif, il fallait sauter le pas et croire en ses qualités, jouer le coup à fond. Sa progression a changé l'échelle des valeurs dans un groupe où Nicolas Seube, le capitaine, semblait titulaire indéboulonnable, et plus encore depuis le début de saison où Reynald Lemaître semble avoir franchi un nouveau pallier. Plus précis dans ses interventions, ses tacles et sa relance, très agressif dans les duels, doté d'un excellent timing dans le jeu aérien, l'ancien pensionnaire de l'INF Clairefontaine a laissé ses complexes au vestiaire. S'il en avait... Comment vit-il cette montée en puissance ? Comment en est-il arrivé là ? Quelques questions, entre autres...
Reynald, on a l'impression, au vu de ce début de saison, que tu as pris du volume de jeu. As-tu personnellement ce sentiment ?
Je joue à ce poste depuis 2006, j'y ai enchaîné quelques matchs et donc gagné en expérience. C'est normal que je progresse avec le temps, d'autant qu'aux matchs joués, s'ajoute beaucoup de travail à l'entraînement.
Peut-on dire que le choix d'être passé du poste de milieu gauche à celui d'arrière gauche est un bon choix ?
Vous m'auriez dit ça il y a quelques saisons, je n'y aurais pas cru mais avec le recul, c'est un bon choix et c'est vraiment devenu mon poste. C'est un choix payant, je m'y sens bien et nous sommes trois pour deux postes de latéraux, ce qui laisse quelques ouvertures.
Au milieu, ça devenait plus compliqué ?
Au moment où Franck m'a demandé de descendre d'un cran, il avait déjà son idée. Il pensait que j'avais les qualités pour ce poste et a en même temps recruté Nicolas Florentin puis, avec l'accession en Ligue 1, Elu pour doubler. Mais dans un match, nous ne sommes que rarement fixés à un poste, l'animation fait qu'un défenseur se transforme en attaquant, que le milieu offensif devienne second défenseur…
Derrière, la concurrence existe aussi…
Oui mais avec Nico et Pablo, nous sommes trois pour deux postes et il y a assez de matchs pour tout le monde. Entre Nico et moi, la concurrence est saine, on se connaît depuis longtemps et on est heureux lorsqu'on fait un bon match. Et grâce à ce bon état d'esprit, cette concurrence nous tire vers le haut dans les matchs comme à l'entraînement. Après, c'est le coach qui décide et il y a un déçu. Mais être footballeur, c'est ça aussi, c'est maîtriser ses frustrations et ses déceptions pour mieux se relancer. Je rappelle tout de même qu'au début de saison, c'est Nico qui jouait et si j’étais déçu de ne pas être sur le terrain, j'ai pris sur moi et prouvé des choses à l'entraînement pour ne pas que ça dure…
Trois joueurs pour deux postes, çà laisse des opportunités, surtout avec les saisons longues et difficiles…
C'est ce que je voulais dire et c'est d'autant plus vrai que Nico peut jouer à droite et peut, en cas de
besoin, remplacer Pablo. Nous ne sommes pas dans le cas de figure où il y a deux véritables spécialistes à chaque poste, deux gauchers à gauche, deux droitiers à droite. En plus, on a vu Nico prendre une place dans l'axe contre Saint-Etienne et à Lorient et cela exige que nous soyons opérationnels tous les trois. De la même manière, je serais apte à occuper le poste de milieu gauche si Elu ou Nico Florentin n'étaient pas en possibilité de jouer. Dans un club comme le nôtre, il faut plus de polyvalence qu'ailleurs.
Tu évoquais justement à l'instant une polyvalence nécessaire. En qualité d'ancien milieu offensif, tu as plusieurs cordes à ton arc…
Disons que ça me permet d'avoir une bonne complémentarité avec Nico et Elu. Je sais comment ils vont réagir, je sais donc où leur mettre ballon et dans les phases offensives qui se présentent à moi, je retrouve d'anciennes sensations. Depuis que je suis à Caen, j'ai fait une formation complémentaire car lorsqu'on est milieu de terrain, il faut aussi savoir défendre, neutraliser son adversaire direct mais aussi récupérer le ballon et bien relancer.
Une qualité qui plait à Franck Dumas, c'est ton agressivité et ta vitesse d'intervention. C'est beaucoup là-dessus que tu as joué contre Saint-Etienne et à Lorient ...
Ma fougue est dans ma personnalité, j'essaye d'en faire une qualité sur le terrain. Au début, ça m'a joué des tours mais maintenant, je fais moins de fautes, j'ai plus de recul, l'expérience a modifié mon comportement et mon analyse des situations. Mais je pense avoir progressé un peu partout, l'agressivité sans un bon niveau technique ne suffit pas. Après, il faut savoir vite jauger les opportunités, monter lorsqu'il le faut, ou pas. Un mauvais choix, surtout en Ligue 1, est souvent dramatique parce qu'on n'a rarement le temps de se rattraper.
Considères-tu avoir désormais un statut, une forme d'autorité suffisante ?
Non, pas du tout. D'abord parce que si je pense pouvoir analyser ma progression, je peux aussi faire l'analyse de mes carences, ou du moins des secteurs où je peux être meilleur. Je dois progresser encore dans la dernière passe, être plus précis, soigner davantage le détail qui fait la différence. Une chose est sûre, quand je rentre sur le terrain, je me donne à bloc, je vais à mes limites, je ne m'accorde pas de droit à l'erreur.
Ce n'est pas se mettre une pression supplémentaire ?
Non, je ne me prends pas la tête, je ne me torture pas avec un tas de questions, je ne me projette pas spécialement à moyen et long terme, je reste dans le présent. Le début de saison s'est bien passé pour moi, c'est bien mais il faut qu'il y ait une suite, et au foot, on ne sait jamais ce qui peut arriver. Par rapport à ces incertitudes, il faut être cool mais être le plus performant possible quand le match arrive.
Mais si on te demande de voir plus loin...
On peut dire qu'on a progressé dans tel ou tel domaine qu'avec beaucoup de recul et ce n'est d'ailleurs pas sur un match solide qu'un technicien va juger, c'est plus sur la durée. Moi, mon objectif, c'est d'être solide sur une saison entière, d'être régulier dans la performance et dans la durée.
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