SM Caen : pilier contesté, Julien Féret a bien changéLigue 1. Caen - Rennes, samedi (20 h). Toujours indiscutable aux yeux du staff, toujours discuté en dehors. À 35 ans, le capitaine caennais n’a plus rien du joueur qu’il était il y a quelques années. Son influence est différente, mais est-elle plus limitée ?
Un capitaine sifflé dans son propre navire. Le 19 janvier, la scène a interpellé sans trop surprendre, avant Caen - Marseille. À d’Ornano, le nom de Julien Féret avait été accueilli avec plus ou moins de satisfaction (et d’élégance) par une partie du kop.
L’affaire n’est pas nouvelle. Avec ou sans Féret, c’est le débat qui revient le plus souvent sur la table des supporters caennais. Celui, en revanche, que le staff n’a pas en interne. Le sujet concerne en effet l’indéboulonnable capitaine du Stade Malherbe, chaque saison dans le top 3 des joueurs de champ les plus utilisés depuis son arrivée en 2014.
« Il y aura toujours des pro et des anti-Féret »
Alors pourquoi tant d’avis si différents et marqués ? « Julien (Féret) , c’est d’abord une question de style , estime Patrice Garande. Même quand il est en pleine bourre, il y a des gens qui n’aiment pas sa dégaine, la façon dont il court… Il y aura toujours des pro et des anti-Féret. » Peut-être aussi parce que le joueur a fondamentalement changé. N’est plus ce transperceur de lignes capable de renverser le cours d’un match. Moins dans la lumière, donc forcément moins influent ?
Le foot a également sa part d’ombre et le travail qui va avec. Dans ce domaine, Julien Féret est désormais très performant. A su faire évoluer son profil quand le turbo a disparu. En Ligue 1, personne ne gagne plus de ballons que lui cette saison. À Malherbe, personne n’en touche plus que lui. « J’ai bien conscience que Julien n’a plus ses jambes de 20 ans , reprend Garande. Par contre, je ne sais pas s’il a déjà été dans une forme aussi bonne que cette saison. Et ce constat renvoie à des données que l’on a sur le plan physique et athlétique. »
46 buts et 47 passes depuis 2008, rien cette saison
L’image du joueur élégant balle aux pieds s’est estompée. Celle d’un milieu relayeur efficace et travailleur a pris le pas. Pas toujours évidente à l’œil nu. Pas toujours mise en avant à sa juste valeur. « Il a toujours une influence sur notre jeu , dit Patrice Garande. Les gens dont c’est le métier connaissent la qualité de Julien Féret et l’importance qu’il a dans notre équipe. Après, si on regarde seulement les dribbles… L’analyse d’un joueur va au-delà de ça. Par exemple, aujourd’hui, il ne perd pratiquement aucun duel aérien. Par contre, on peut attendre plus de lui dans l’efficacité offensive. »
Surtout dans le milieu à trois appelé à durer, censé « le libérer » dans sa projection. Cette saison, celui qui n’avait connu que deux exercices en-dessous de 4 buts depuis ses débuts en Ligue 1 (2008) n’est plus du tout décisif. Le fameux coup de reins qui a tant fait mal, de Rennes à Caen, a des effets désormais limités.
La lucidité est aussi moindre à l’approche du but adverse. Parce que Féret a 35 ans, qu’il se démultiplie sans le ballon et a moins de justesse avec. Une évidence physique, mais pas seulement. « C’est un joueur d’équipe, qui ne joue que pour le collectif et jamais pour lui , affirme Patrice Garande au sujet de celui qui a compilé 46 buts et 47 passes décisives en 9 saisons de Ligue 1 (2008-2017). Il a quelque chose qui le dessert, qui m’enchante moi et enchanterait tous les entraîneurs, c’est sa mentalité exceptionnelle. Ça se traduit parfois par un manque d’ambition personnelle. Je voudrais qu’il soit parfois plus individualiste. Il peut être mauvais, si l’équipe a gagné, il est content. »
Ces phrases-là ont seulement valeur de remarque. « Fondamentalement, je ne peux pas lui en faire le reproche. Avoir un joueur comme cela, c’est bien. Il y en a tellement d’autres qui pensent d’abord à eux… » En fin de saison, Féret pensera forcément à lui et seulement à lui. Celui qui ne sait pas s’il sera encore footballeur dans quatre mois aura un choix à faire. Ranger les crampons ou entamer une 15e saison de rang chez les pros.