L'Equipe
Bastia s’autodétruit
Le club corse a perdu sa dernière chance de monter en L1 avant que ses supporters envahissent son terrain avec une étonnante facilité.
CE MATCH DÉCISIF entre Caen et Bastia au coude à coude pour l'accession en Ligue 1 promettait d'être tendu. Il le fut. A cause de l'enjeu d'abord, mais aussi à cause des rancœurs du match aller, gagné par Caen (4-1) et qui s'était terminé avec deux expulsés Caennais et deux blessés Corses (André et Lorenzi). Alors que les Normands menaient 2-0 grâce à deux buts de Compan et Deroin (74e et 76e) et se dirigeaient tranquillement vers une victoire précieuse dans la course à la montée, le terrain fut envahi, par une vingtaine de supporters bastiais, la plupart très jeunes et le visage masqué, venus de la tribune Est de Furiani.
Les joueurs des deux camps se précipitèrent dans les vestiaires protégés par un service d'ordre dépassé. Rapidement ils furent une centaine à investir la pelouse aux cris de « dirigeants démission » et « rendeznous le Sporting » et en déployant une banderole sur laquelle était inscrit « Stumacati (écœurés, en corse) » . On jouait la 80e minute et le match était arrêté par l'arbitre, Pascal Viléo.
Le bus caennais caillassé
Après un petit quart d'heure de battement, la pelouse étant toujours occupée et les esprits toujours échauffés, il prit la décision d'interrompre définitivement le match. « La sécurité des joueurs n'était plus assurée et j'ai pris la décision d'interrompre le match en accord avec les dirigeants, le chef de cabinet du préfet et le représentant des forces de l'ordre, expliquait-il après le match. Sur le terrain, on sentait de la tension dans un contexte électrique dû à la position de Bastia au classement et au contentieux du match aller. Maintenant je vais faire un rapport à la Commission de discipline qui prendra une décision. Ce que je trouve dommage, c'est que tout le monde savait que ça allait dégénérer si Bastia perdait et que le maximum n'a peut-être pas été fait. »
Effectivement, l'arrivée du bus caennais, caillassé, avait déjà été houleuse. Et il fallait bien du courage aux tireurs de corner normands, au milieu des projectiles et des bombes agricoles, pour aller s'exécuter. Et cela en l'absence étrange des forces de l'ordre. « C'est triste de voir la saison se terminer comme ça, regrettait Louis Multari, le président corse dans un vestiaire où la confusion était aussi totale puisque les Caennais et leurs dirigeants étaient pris à partie. Je comprends la déception des supporters et je suis prêt à engager le dialogue mais pas dans ces conditions. » Bernard Casoni, l'entraîneur corse, était lui aussi déçu, mais plus par le jeu de son équipe : « On fait le même match que contre Dijon (0-2). On domine et on prend un but de merde qui nous assomme. Après, sur les incidents, je ne condamne rien mais c'est vrai qu'on a donné une mauvaise image du club. Déjà qu'on n'est pas aimés, ça ne va pas arranger les choses. Mon avenir, ce n'est pas grave. L'important, c'est le club. On va faire un état des lieux et préparer la saison prochaine. »
Au milieu de la sinistrose ambiante, il y en a un au moins qui se réjouissait des probables trois points récupérés par Caen sur tapis vert. C'était Brahim Thiam : « On enchaîne les victoires, c'est bien. On ne se préoccupe que de nous et on avance. » Car pour parler football, c'est évidement Caen qui a fait hier soir, la bonne opération de la soirée. Avec le match nul de Lorient à Créteil (1-1), les Normands reviennent à deux points des Bretons. A trois journées de la fin tout reste encore possible. Pas pour Bastia, qui après avoir perdu ses illusions, risquent de récolter une grosse amende et une suspension de terrain. Pas idéal pour préparer la saison prochaine. En Ligue 2, bien sûr.
Vincent GARCIA
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Ouest-France
Le bus caennais caillassé à son arrivée
Terrain envahi et match arrêté à Furiani
Dominé, mais frappant deux fois les poteaux, Caen a fait la différence dans les vingt dernières minutes, avant que le match ne soit interrompu par une centaine de spectateurs envahissant le terrain. Le foot s'égare un peu plus.
Dire que Caen a mérité son succès, le 6e de rang, terni par l'envahissement du terrain, serait quelque peu exagéré. Mais les Normands ont répondu présent dans le sprint final, grillant la politesse à des Bastiais dominateurs une heure durant. Compan puis Deroin ont conclu deux balles de contres, pour renforcer l'espoir à la faveur du nul lorientais à Créteil.
Ce match « de la dernière chance », dixit le coach Casoni, Bastia l'avait pourtant abordé avec tous les égards. Jets de pierres sur le bus normand en préambule, siège en règle des Calvadosiens par la suite. Comme ceux-ci manquaient de maîtrise pour tenir la balle en milieu de terrain, les Corses et leur entre jeu densifié s'étaient assuré la mainmise sur le début de rencontre. Dans un match que Dumas pressentait « pauvre en occasions », Planté était intervenu par deux fois sur autant de coups de pied arrêtés. Face à Diane pour se chauffer sur coup-franc (18e), puis pour sortir, façon grande classe, une tête de Maire filant dans sa lucarne (23e). Mais, petit à petit. Malherbe avait laissé l'orage se muer en crachin. Un contre normand aurait même pu s'inscrire en déni de justice. Bénéficiant d'un raté Marester-Penneteau, Samson se trouvait seul, dans les 16 m, excentré. Sa frappe vers le but vide, sans angle, trouvait le poteau (34e) pour la plus franche opportunité du premier acte. La position de tir offerte à Deroin (36e) apparaissait presque anecdotique, au cours de 45 minutes crispées comme un chanteur d'I Muvrini ayant oublié sa chemise noire.
A la mi-temps, à plus de 1000 km au nord, Valenciennes se trouvait donc en L 1, et Lorient aux portes de l'élite. Caen, évanescent dans le jeu, devait de nouveau s'en remettre à Planté pour espérer. Il sortait efficacement (4e), mais qu'il soit le meilleur élément posait problème.
Les Calvadosiens n'étaient pas dans le sens de la marche, phénomène rarement observé sur les matches retour. Une alerte signée André (54e), une autre via Ghisolfi (62e) soulignaient un peu plus l'évidence, et l'absence de Zubar au cœur des duels. Pourtant, comme lors de la 1er période, Caen recouvrait petit à petit ses esprits, et s'offrait l'occasion, avec un grand O. Une instinctive volée de Campan, servi par Thiam, se heurtait à la transversale d'un Penneteau battu (66e) au sortir d'un coup-franc. La 2e, sept minutes plus loin, était plus productive. Aux 25 m, l'ancien Vert trouvait cette fois l'intérieur du montant pour un 0-1.
Le temps que Bastia pleure sur ses espoirs d'accession, Caen avait de nouveau gratté une balle à la ligne médiane, et signé le 0-2 via Deroin, servi par Campan (76e). Le public bastiais ne trouvait rien de mieux à faire que d'envahir le terrain. Désormais, c'est à la Ligue de jouer et de voir les suites à donner…
Dominique FAURIE.