Frédéric Lordon, comme toujours, le verbe qui tue :
"L'affect qui domine la campagne est l'affect de peur. Or, en période électorale, l'affect de peur prend un nom politique précis qui s'appelle "le vote utile". C'est le vote qui ferait voter pour n'importe quel groupe de bourricots sous couvert de faire barrage. On avait eu le facho contre l'escroc en 2002, donc, on va être appelé à voter pour le sociopathe à costard contre la fachote ou pour le banquier néolibéral contre la fachote, etc. etc. Le vote de peur, en général, c'est désastreux, parce que ça n'affirme rien politiquement, ça ne pose rien. C'est un mouvement de rétraction. Et, à force de voter sous le coup de la peur, on se réserve le droit en technicolor et en grandeur réelle à tout ce qu'on veut éviter, faute de construire une réelle alternative politique positive."
"Emmanuel Macron est un candidat sans base sociale réelle, qui ne parcourt sa trajectoire que sous l'effet de puissantes et permanentes injections de stéroïdes sondagio-médiatiques. Et ça peut faire une élection ! Oui, mais ça ne fera pas un mandat très tranquille. Qu'est-ce que c'est que la base sociale de Macron ? Ce sont les startupers et ceux qui se fantasment en Bill Gates et en Mark Zuckerberg de l'avenir. Si vous voulez, c'est une fraction de la classe bourgeoise qui fait du bruit comme quinze. C'est d'ailleurs le propre de la classe bourgeoise : elle sait faire du bruit comme quinze. Mais, comme disait Platon, dans les profondeurs du pays, il y a le gros animal, et lui, on lui donne pas la parole, sauf, les jours d'élection. Et quand il la reprend, c'est en général pour tout foutre en l'air."
_________________ L'histoire n'est pas la science du passé, mais la science des hommes dans le temps.
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