Comme un parfum d’élite
Avant le choc normand, Yoan Gouffran, milieu de Caen, et Steve Mandanda, gardien deux des joueurs les plus convoités de L 2, ne taisent pas leur appétit de L 1.
« Il est en retard, comme d’habitude. » Yoan Gouffran est arrivé le premier au rendez-vous, fixé à Deauville, à mi-chemin entre Caen et Le Havre. Steve Mandanda le rejoindra une dizaine de minutes plus tard. Amis depuis leur rencontre chez les Espoirs, en mai dernier, les deux joueurs ont attisé les convoitises cet été, à leur retour de l’Euro (élimination en demi-finales face aux Pays-Bas, 2-3 a.p.). Approché par Auxerre, Saint-Étienne et Monaco, supervisé par Chelsea, le Caennais,vingt ans, resté en Normandie,est aujourd’hui meilleur réalisateur de son club (10 buts). Comme lui, Mandanda, vingt et un ans, sollicité par Paul Le Guen pour rejoindre les Rangers, a rempilé pour une saison en L 2. Les deux ont la même vision de leur avenir : l’an prochain, ils seront en Ligue 1.
DEAUVILLE –
de notre envoyée spéciale
« CE DERBY est-il déjàun match décisif ?
Steve MANDANDA. – Non, pas encore. Pour nous, ça se jouera plus tard, avec la réception de Strasbourg (27e journée). Là, c’est un match important.
Yoan GOUFFRAN. – On a besoin d’une victoire après la défaite à Bastia (0-2). Sinon, on commencerait à se poser des questions. Mais, comme on dit, les grandes équipes ne perdent
pas deux fois de suite (il rigole).
S. M. – Alors on verra ce que vous valez… Je pense que ce sera un bon match. À l’aller déjà (2-2), ça jouait bien. Le nul était mérité, je pense.
Y. G. – Mérité ? Si je marque à la fin…
S. M. – T’as une occasion à la fin, c’est tout. Il a déjà marqué l’année dernière, là, s’il marquait, je savais que j’allais y avoir droit pendant six mois. L’année dernière, on se ne connaissait pas trop, donc il ne pouvait pas chambrer. Mais s’il marquait là, j’étais mort.
– Vous vous êtes rencontrés juste avant l’Euro Espoirs. Le courant est-il tout de suite passé ?
S. M. – Oui, parce qu’on avait les mêmes relations. On venait de se rencontrer en Championnat, on s’est chambrés un peu, et c’est parti tout seul. Lui, il n’arrête jamais de chambrer. Tu ne peux pas parler sérieusement deux minutes.
– L’Euro est-il un bon souvenir ou plutôt une déception ?
Y. G. – C’est un beau souvenir, car je ne m’attendais pas à le disputer. C’est arrivé vite, je me suis retrouvé avec des joueurs comme Mavuba, Toulalan. D’un autre côté, je suis déçu parce qu’on avait certainement la meilleure équipe du tournoi.
S. M. – Moi, ça me laisse vraiment un goût d’inachevé. On avait un super groupe, on a fait des supers matches. Contre les Pays-Bas (en demi-finales), la première mi-temps (0-2) nous coûte cher. On revient, mais physiquement, en prolongation, c’était difficile. Sur ça, on s’en remet à peu près, et on se fait éliminer par Israël (barrages de l’Euro 2007). Cette élimination, je ne m’en suis toujours pas remis.
– Vous avez tous les deux été convoités cet été. Sans regrets ?
S. M. – Quand j’ai appris que je ne pouvais pas partir, j’étais très déçu. Parce qu’on se dit qu’on passe à côté de quelque chose. Mais, après réflexion, je crois que c’est une bonne chose. Cette deuxième saison en L2 me fait énormément de bien. Je suis à un poste où j’ai besoin de jouer.
Y. G. – Avant de partir à l’Euro, tout était déjà arrangé avec Franck Dumas et le président, c’était prévu que je reste encore un an. Le projet de montée me plaisait aussi, je voyais que le club était ambitieux.
– Vous n’avez jamais hésité ?
Y. G. – J’y ai pensé. À l’Euro, on ne joue qu’avec des joueurs de L1, quand on les entend parler, on se dit : “Ça doit être vraiment bien.” On aimerait être à leur place aussi.
Mandanda : « Rester, ce serait la solution de facilité »
– Est-ce la Ligue 2, moins médiatique, qui vous rebutait ?
S. M. – Quand on regarde les matches à la télé, on ne voit que la L1, des beaux stades… Si tu as le choix entre jouer au Parc des Princes ou à Duvauchelle (Créteil), en général tu préfères le Parc ! Si Le Havre avait été en L 1, ç’aurait été différent. J’aurais mieux pris le fait de rester.
Y. G. – Moi, la Ligue 1, j’y ai plus pensé cet été. Je me disais que ce serait une bonne chose d’y jouer, déjà pour rester dans le groupe Espoirs, et aussi pour continuer à progresser. Mais je ne regrette pas d’être resté.
– Si vos clubs ne montaient pas, vous partiriez ?
Y. G. – Pour moi, c’est clair, je ne resterais pas.
S. M. – Moi je l’ai dit, le président le sait. Ils savent qu’aujourd’hui je veux jouer au plus haut niveau, et le plus haut niveau c’est la L 1. On a envie de franchir un palier. Mais, si on ne monte pas, je sais très bien que je n’aurai pas envie de rester en Ligue 2.
– Et si vos clubs montaient ?
Y. G. – Si on monte… Personnellement, et je pense que tu vas penser comme moi, je suis sûr de jouer. C’est mon club formateur, je me sens chez moi. Après, s’il y a l’opportunité d’aller plus haut, on y réfléchira, évidemment.
S. M. – Rester, ce serait la solution de facilité…
Y. G. – Et c’est bien aussi de se lancer des défis.
S. M. – Mais ça dépendra des propositions. Si c’est pour être deuxième gardien…
Gouffran : « L’idéal, c’est d’aller étape par étape »
– Et la suite de votre carrière,vous l’imaginez comment ?
Y. G. – L’idéal, c’est d’aller étape par étape, d’abord en L 1. Après, si on est vraiment amenés à partir à l’étranger, pourquoi pas ? Mais il
faut un coach qui te fasse un minimum confiance.
S. M. – Avant, je rêvais de grands clubs étrangers. Mais si tu veux avoir une belle carrière, il faut prendre le temps. Il faut se servir des erreurs des autres, partis trop jeunes. Si on doit aller dans un grand club, on ira, de toute façon. Autant attendre le vrai bon moment.
– Quels sont les clubs qui vous font rêver ?
S. M. – Ma génération, c’était soit Marseille soit Paris. Mais je n’avais pas de préférence.
Y. G. – Moi, c’est le PSG. Je viens de la région parisienne. Ils ne descendront jamais. Sur le papier, ils ont une grande équipe.
– Et Caen-Le Havre, sur le papier ?
Y. G. – Je pense que ça s’équilibre.
S. M. – Ça va se jouer à rien du tout. Un coup de génie, un coup de pied arrêté. Une boulette du gardien… (il rigole).
– Et si vous avez un duel tous les deux ?
Y. G. – Je l’allume, pas de problème.
S. M. – Il faut déjà la cadrer… Mais c’est de la tête qu’il est fort (en avril dernier, lors de Caen-Le Havre (4-1), Gouffran avait marqué deux buts de la tête).
Y. G. – L’année dernière, il n’a même pas bougé.
S. M. – Si ! Évidemment j’ai bougé ! Bon, le deuxième, j’étais vraiment battu. Je m’en souviens de ce but. La balle doit sortir largement, mais Compan la remet, je ne sais même pas comment. Si je fais le même ciseau, je me claque. Et, comme par hasard, elle retombe sur la tête de qui ? »
MÉLISANDE GOMEZ
CAEN - LE HAVRE
AUJOURD’HUI, 20 H 30, STADE MICHEL-D’ORNANO (Eurosport)
CAEN: Planté– Hengbart,Thiam, Sorbon, Seube (cap.)– G. Leca–Gouffran, Deroin,
Florentin – Mazure,Grandin. Remplaçants : Costil (g.), Quellier, Lemaître, Toudic,
Valéro. Entraîneur : F. Dumas.
LE HAVRE:Mandanda –Medaci, Ducrocq (cap.), Hénin, Bedimo - Kharbouchi, Aït-
Ben-Idir, Digard, Alla – K. Traoré, Lesage. Remplaçants : Blondel (g.), Soumaré,
Gauvin, Fouret, Alassane. Entraîneur : T. Uvenard.
Arbitre : M. Piccirillo.
_________________ "Même dans la défaite on va chanter"
mon blog : http://kalou31.skyblog.com

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