Je ne suis pas du tout d'accord avec toi sur plusieurs points:
Manu a écrit:
Le premier serait pour l'activité économique générée par le secteur tertiaire, avec notamment la présence de sièges de grandes entreprises, qui pourraient se localiser ou tout du moins rester sur une ville comme Caen, qui se trouverait à 1h15 (approximativement) de Paris. Comme il est précisé dans ce papier, le TGV permet aux villes principales (même si Caen reste une ville de deuxième ou troisième rang) de se développer.
D'abord, pure question sémantique mais mettre Caen au second rang, c'est être très optimiste. On parle d'une ville de 113 000 habitants, dans une agglo qui ne fonctionne pas (cf le trajet éventuel du second périph) et qui s'inscrit dans une région principalement agricole, au tissu industriel en déperdition et à la population vieillissante. Si on considère que Paris est au premier rang, Lyon, Lille, Nantes, Toulouse au second; il me parait cavalier de mettre Caen au niveau de Rennes ou de Bordeaux.
Ensuite, il faut voir ce que l'on veut. Me basant sur les travaux de Jean Ollivro, géographe relativement reconnu sur la place universitaire, bien qu'un peu barré, et très sympathique au demeurant, qui a travaillé sur les effets de l'ouverture d'une LGV sur les territoires, on remarque deux choses.
D'abord le développement d'un "effet-tunnel". Les points sur l'axe entre le départ et l'arrivée ne profitent pas du développement des échanges. Normal puisqu'un TGV pour être rapide à besoin de s'arrêter de facon très ponctuelle. Ainsi, dans un optique purement caenno-centrée, un TGV Caen-Paris aurait des effets désastreux pour l'espace entre Caen et Paris, sauf a transformer le TGV en omnibus, mais dans ce cas quel intérêt?
Par ailleurs, au niveau des emplois de haut niveau, de décision, il a eu la surprise de constater que les plus haut niveau partaient sur Paris et que les cadres moyens montaient sur Rennes, quittant le territoire de départ (Saint Brieuc, Guingamp, Lannion...). Ce qui provoque une polarisation sur un point du territoire.
Après c'est un choix de modèle de développement, mais il faut avoir l'honnêteté de présenter tous les tenants et aboutissants dudit choix. Je ne veux pas dire que tu es malhonnete mais que ce que tu présente me semble un peu biaisé.
Manu a écrit:
Mais surtout, cela permettrait à beaucoup de personnes travaillant sur Paris de pouvoir revenir vivre sur Caen, avec des coûts moins élevés notamment pour le logement. Pour ces personnes, les revenus viendraient de Paris mais seraient dépensés sur la Basse Normandie. On appelle ça de l'économie résidentielle, et c'est une source de développement économique non négligeable pour un territoire. L'un des enjeux est de pouvoir capter les revenus gagnés ailleurs pour qu'ils soient dépensés chez nous. C'est un peu pareil avec les vieux qui partent à la retraite en Province par exemple.
L'économie résidentielle, si chère à Laurent Davezies et vendue comme la solution au développement local, c'est pour moi du caca en barre. Parce que q'est ce que tu crées comme emplois au niveau local? Des infirmières, des nounous, des services à la personne. Rien de réellement porteur d'une véritable valeur ajoutée pour le territoire, et rien de particulièrement producteur de richesse.
De plus, comparer la situation de salariés sur Paris avec celle des retraités sur la cote méditerranéenne est inadéquat pour moi parce que les vieux ne sont pas aussi mobiles que les actifs. Par ailleurs, les effets de cette mobilité n'ont jamais été évalué de manière fiable. Enfin, des salariés parisiens qui rentrent très souvent dans la région le week end, ca existe déjà.
Manu a écrit:
C'est pourquoi Karibou, même si le TGV coûte cher, je pense que ce serait une très bonne chose pour une ville comme Caen.
En terme d'image je suis entièrement d'accord. Mais après? Je pense que le développement des collaborations locales, avec les autres villes normandes mais aussi bretonnes, sarthoises et mayennaises, tout en améliorant les connexions entre les différents points, sans en arriver au TGV Rennes-Caen bien entendu, est un vecteur de développement plus durable. Même si par ailleurs, l'amélioration des relations entre Caen et Paris ne doit pas être mis totalement de coté, mais ne nécessite pas des travaux aussi couteux que la mise en place d'une LGV.
Titi, si tu relis mon message, tu verras que je précise bien que les effets seraient positifs uniquement si on réfléchit sur le cas de Caen. Bien sur que ca entrainerait une polarisation et une desertification du reste de la région. Il suffit d'ailleurs de voir dans l'article de Bouba l'exemple pris avec Loudun. Etant donné que je m'oriente vers du développement local, bien sûr que je ne suis pas favorable à ce genre de développement. Maintenant, je pense que pour qu'une région soit performante, il faut qu'elle ait une ville centre forte. Et ce n'est pas le cas de Caen. Le TGV lui permettrait de gagner en attractivité.
Maintenant concernant l'économie résidentielle, je dis également qu'il ne faut pas baser son développement uniquement sur cette stratégie, mais qu'elle peut être un moyen très intéressant pour faire progresser une région. C'est pourquoi, on ne peut pas s'en priver. Effectivement, les emplois générés par ce type de stratégie ne sont pas très porteurs avec quasiment aucune valeur ajoutée, mais l'apport essentiel dans cette stratégie vient des revenus gagnés ailleurs et dépensés sur le territoire. C'est pourquoi, même si les retraités ne sont pas mobiles, à partir du moment où tu les as, ils dépensent chez toi. Tu peux aussi développer toute une offre de services pour répondre aux besoins de cette catégorie d'individus. En revanche, il faut aussi être capable de les prendre en charge, ce qui coute pas mal d'argent aux collectivités.